Une société à haut risque …
Dans ce quatrième numéro, la revue Fracas (déjà évoquée sur ce blog lors de son lancement) braque ses projecteurs sur une réalité à la fois banale et terrifiante : la prolifération des accidents industriels en France. En 2020, plus de 68 000 incidents ont été recensés sur le territoire, soit près de 187 par jour. À travers cette enquête percutante, Fracas confirme la thèse du sociologue Ulrich BECK : nous vivons désormais dans une société du risque, où la menace ne vient plus d’un événement extérieur, mais des systèmes technico-économiques eux-mêmes.
Sites Seveso : la routine du danger …
Avec près de 1 300 sites classés Seveso sur le territoire, la France est devenue un damier d’explosifs potentiels. Raffineries, dépôts de produits chimiques, usines agro-industrielles… Tous peuvent à tout moment basculer dans la catastrophe. Loin d’être des cas exceptionnels, ces installations structurent une normalité toxique, tolérée et même soutenue par les politiques d’aménagement du territoire. Le journal interroge frontalement : « Sommes-nous assis sur une bombe industrielle ? »
Démantèlement des protections …
Le dossier proposé par la revue Fracas met aussi en lumière le recul des dispositifs de prévention. Les moyens humains et financiers alloués aux inspections, à la formation et à l’entretien des sites dangereux sont en chute libre. La logique de rentabilité l’emporte, au détriment de la sécurité des travailleurs, des riverains et des écosystèmes. L’État semble démissionnaire, laissant le secteur privé s’autoréguler dans un climat d’impunité croissante. Cette dérive est aggravée par la complexification des chaînes de sous-traitance et par la délocalisation des responsabilités.
Un appel à réinventer la vigilance …
Face à ce constat implacable, Fracas ne se contente pas d’accuser. Le journal appelle à une réappropriation citoyenne des enjeux industriels, en s’appuyant sur les luttes locales, les lanceurs d’alerte et les collectifs de vigilance. Il s’agit de remettre en cause un modèle de développement fondé sur l’oubli du risque, et d’imaginer une politique industrielle écologiquement soutenable et socialement juste.
Avec ce numéro, Fracas livre un acte fort de journalisme d’investigation engagé. En mêlant récits de terrain, données chiffrées et analyse politique, la revue offre un regard lucide et mobilisateur sur une France à bout de souffle, où chaque usine peut devenir le point de départ du prochain désastre. N’hésitez surtout pas à vous abonner à cette excellente revue qu’il faut absolument soutenir pour que d’autres voix subsistent dans le paysage médiatique Français.
