Le collectif du Loriot, est un collectif d’enseignant·es chercheur·ses en sciences sociales qui œuvrent à Poitiers. Le collectif vient tout juste de publier un livre intitulé « Avoir 20 ans à Sainte-Soline » aux éditions La Dispute. L’ouvrage a été initié et coordonné par six chercheur·ses en sciences sociales : Etienne DOUAT, Joanne LE BARS, Mathias LENZI, Benoît LEROUX, Gwendal ROBLIN et Hélène STEVENS. L’ouvrage vient tout juste de paraitre le 8 mars 2024.
Que trouver dans « Avoir 20 ans à Sainte-Soline » ?
Le livre « Avoir 20 ans à Sainte-Soline » est composé de huit portraits-entretiens sociologiques et de 22 courts textes de témoignages, analyses scientifiques, points de vue militants, ainsi que de diverses expressions artistiques et graphiques. Le livre documente les faits qui se sont déroulés lors des manifestations, très médiatisées, des 25 et 26 mars 2023 dans les Deux-Sèvres à Sainte-Soline contre les projets de mégabassines.

Le livre évoque un tout autre récit que celui que les autorités ont bien voulu distiller à l’opinion publique par l’intermédiaire des médias « mainstream ». L’objectif était pour le pouvoir politique de créer par l’attitude des scènes de violences extrêmes afin de charger les manifestants en discréditant la cause juste portée par ces derniers.
L’objectif du gouvernement était surtout que l’opinion publique se désolidarise des revendications portées par les manifestants en faisant passer ces derniers pour d’affreux casseurs. Le récit politique et médiatique dominant a présenté les manifestant·es comme de violent·es « écoterroristes ». Cela fait pourtant plusieurs mois déjà que le gouvernement travaille l’opinion à la construction de la figure du militant écoterroriste …
Comment peut-il en être autrement ? Est-il possible qu’un tout autre message puisse être diffusé par les médias « mainstream » ? Comment ne pas oublier que ces derniers sont financiarisés, gavés de publicités et dirigés par des directions solidaires des classes dominantes tout en étant complètement dépendante du pouvoir politique et économique. Informons-nous par l’intermédiaire des médias indépendants qui nous éclairent comme Mediapart, Blast, Reporterre et les autres et si possible, soutenons les financièrement !
N’oublions jamais également (et c’est documenté) que le dispositif policier en place pour garder telle une citadelle, un trou béant était parfaitement surdimensionné. Les forces de l’ordre était surtout préparées à en découdre avec les manifestants. Un arsenal de guerre était ce jour déployé sur place, faisant de nombreux.ses blessé.e.s. Toute la lumière sera prochainement faite pour reconstituer la chaine de commandement politique que les autorités ont mis en place ce jour là afin de casser du manifestant … J’ai déjà eu l’occasion d’évoquer avec plus de détails cet événement dans un autre billet.
Ce livre contribue à sa manière à la production d’un contre-récit décrivant ce qu’il s’est réellement passé autour de ce village des Deux-Sèvres en mars 2023. Ce faisant, il porte une attention particulière à la jeune génération, qui occupe une place décisive et centrale dans ce mouvement. À travers des portraits de personnes de 17 à 29 ans, il donne à voir les parcours qui les ont menées à Sainte-Soline, ce qu’elles y ont éprouvé et les manières dont elles envisagent désormais leur place dans la société post « Sainte-Soline ».
L’ouvrage « Avoir 20 ans à Sainte-Soline » apporte sous forme de réponse au traitement médiatique et politique qui a été fait autour de ces événements. « Avoir 20 ans à Sainte-Soline », est un ouvrage collectif qui propose de restituer à l’opinion, par un jeu d’entretiens croisés avec celles et ceux qui y ont participé, une série de récits de ce week-end de mobilisation et propose un contre récit sur l’engagement de jeunesse.
L’engagement pour les autres …
Leurs récits se mêlent aux points de vue d’autres militant·es, artistes ou chercheur·ses. L’ensemble de ces voix témoigne de ce qui s’est alors joué, tant dans les violences provoquées d’un État mis au service de l’agro-industrie capitaliste que dans les aspirations nouvelles, les transmissions intergénérationnelles et l’inventivité politique qui s’y sont exprimées. L’ampleur du nombre de personnes mobilisées il y a un an, leur détermination et la convergence de leurs luttes confirme la montée en puissance d’une résistance politique à la destruction du vivant.
La mobilisation exemplaire de ces jeunes gens est systématiquement motivée par un souci permanent de partager et de protéger l’eau tel un bien commun nécessaire à une vie harmonieuse sur notre planète.
L’eau, comme une ressource naturelle appartenant au collectif, mais qui est aujourd’hui vouée à être privatisée au seul profit de quelques agriculteurs.trices asservis aux dictats de l’agro-industrie capitaliste. Cette filière industrielle est uniquement motivée par la recherche d’un profit maximum à court terme, ruinant et empoisonnant les paysan.ne.s, dévastant nos paysages tout en produisant une nourriture de qualité médiocre.
L’on ne peut se résoudre à accepter un tel dictat sans le combattre et envisager d’autres modèles vertueux, ou l’homme trouverait à produire une nourriture saine, en harmonie et respect avec la nature, tout en vivant normalement du fruit de son travail. La mobilisation à Sainte-Soline (comme dans d’autres luttes par ailleurs) est simplement motivée par une volonté de reprendre le contrôle sur une société capitaliste de l’outrance et de l’exagération, qui broie autant les hommes et les femmes que notre environnement et qui nous mène doucement vers le mur et l’impasse.
Non, les agriculteurs.trices ne sont absolument pas les ennemis ou les opposants des défenseurs de la nature comme l’état dominant (relayé par les syndicats agricoles dominants également) cherche à nous faire croire. Nous ne sommes absolument pas opposés. Nous exprimons comme les paysan.n.es en colère que le système actuel n’est plus tenable et qu’il est temps d’envisager d’autres modèles. Il s’agit plutôt de promouvoir un modèle de polyculture-élevage qui protège la biodiversité et qui propose ainsi un meilleur rempart par les temps incertains que le changement climatique induit.
Il s’agit pour les ouvrier..e.s de la terre de travailler sans s’empoisonner. Il s’agit également que chacun·e ait les moyens de s’offrir une nourriture de qualité peut importe ses revenus tout en assurant la juste rémunération des paysan·nes qui la produisent.
Quand la jeunesse défile à Saint-Soline, c’est bien pour défendre un autre modèle pour nos agriculteurs.trices et au delà un autre modèle pour notre société !
Et … pour conclure …
Alors il me plait à rêver et à me dire que Sainte-Soline est belle et bien un point d’étape vers une révolution écologique que j’appelle de mes vœux les plus chers. Ma génération appartient à celle dont l’enfance n’a pas été déterminée par les catastrophes écologiques, encore moins celle de nos parents qui évoluaient dans « les trentes glorieuses ». Nous avons enfin à travers cet ouvrage « Avoir 20 ans à Sainte-Soline », un livre qui donne la parole à celleux qui en ont été privés.
Respectons infiniment le message envoyé par le génération actuelle qui doit composer avec un monde qui se brise, la multiplications des catastrophes écologiques, les effets du changement climatique, mais également l’extinction de la biodiversité sous la chimie et le béton. Ne trouvez-vous pas que cela légitime les actions que la jeunesse engagent en œuvrant et se mobilisant pour une révolution sociale et environnementale ? Personnellement j’ai envie simplement de leur adresser un merci si respectueux car vos mobilisations nous obligent !